(Une version de cette lettre a été envoyée aux présidents des cinq partis politiques du Nouveau-Brunswick en hiver 2018 afin que les priorités de l’Acadie du Nouveau-Brunswick soient reflétées dans les plateformes des différents partis.)

Monsieur le président,

Au nom de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB), j’aimerais vous sensibiliser aux enjeux prioritaires de l’Acadie du Nouveau-Brunswick.  Plus spécifiquement, la SANB aimerait que ces enjeux soient reflétés de manière respectueuse dans la plateforme du Parti pendant la prochaine élection provinciale. 

Permettez-moi, par la présente, de vous énumérer les dossiers importants sans ordre de priorité. Ces dossiers énumérés incarnent l’évolution des droits fondamentaux sur le territoire néo-brunswickois et le développement de la communauté acadienne et francophone.

  • Gouvernance locale : présentement, près d’un tiers de la population acadienne de la province vit dans des Districts de services locaux (DSL) et ne peut donc bénéficier des leviers de développement communautaire que procure la municipalité (notamment en matière d’immigration francophone, d’arts et culture, de tourisme, de développement économique, etc.). Dans certaines régions, c’est même la majorité des gens qui habitent dans les DSL et qui n’ont ainsi aucun mot à dire sur le développement de leur communauté. La Province exige présentement que les regroupements des DSL avec les municipalités adjacentes soient faits de façon volontaire. Or, la Province a en place des barrières fiscales et administratives qui rendent ces regroupements quasi-impossible ou, à tous le moins, très improbables. Par exemple, il est aberrant que, dans les DSL, les entreprises ne paient pas pour le coût des routes. La SANB réclame que les barrières actuelles aux regroupements municipaux soient éliminées et que des mesures incitatives soient mise en place pour encourager et favoriser les regroupements municipaux.
  • Pleine dualité en éducation : bien que l’Acadie du Nouveau-Brunswick connaisse une meilleure situation que celle des autres provinces canadiennes, son modèle de gouvernance scolaire manque encore d’éléments intrinsèques afin de le rendre exemplaire vis-à-vis de l’esprit de l’Article 23 de la Charte.  La SANB réclame donc que le Gouvernement du Nouveau-Brunswick accorde un droit de gestion complet aux Conseils d’éducation du district.
  • Dualité en santé : le droit de la minorité linguistique de gouverner son système de santé représente une avancée intrinsèquement liée au respect des droits fondamentaux, et à la notion même d’une institution gouvernée par et pour les francophones. La SANB réclame donc la dualité complète en santé.
  • Dualité en petite-enfance : le continuum en éducation nécessite une pleine gestion de la gouvernance communautaire en matière de petite-enfance.  Le Nouveau-Brunswick devrait être un chef de file en matière de politiques progressistes et de mesures positives en matière sociale. Le Gouvernement du Nouveau-Brunswick pourrait catapulter un agenda social, qui contribue à freiner l’assimilation, mais plus encore qui crée un environnement favorable à l’employabilité.  La SANB réclame donc la dualité complète en petite-enfance.
  • Éducation postsecondaire : l’avenir de l’Acadie du Nouveau-Brunswick repose sur la création d’une main-d’œuvre bien formée, au niveau collégial et au niveau universitaire.  Le Gouvernement du Nouveau-Brunswick doit manifester un engagement ferme envers le financement de nos institutions de savoir. Et ce, pour plusieurs raisons : pour assurer leur pérennité à long terme, permettre à nos institutions de demeurer compétitives et avant-gardistes sur les scènes provinciales, régionales, nationales et internationales. La SANB réclame donc une formule de financement postsecondaire adapté aux réalités de l’Acadie moderne.
  • Dualité en immigration : l’immigration francophone est avant tout sociale, un élément de la fabrique de notre société en devenir. La gestion complète de l’immigration francophone est prééminente afin d’assurer que l’Acadie du Nouveau-Brunswick puisse bénéficier pleinement de l’opportunité que représente une société pluraliste et multiculturelle de langue française. La SANB réclame donc la création d’une structure gouvernementale, à l’image d’un conseil scolaire ou d’une régie de santé, qui favorise la gestion holistique de l’immigration francophone.
  • Plan pour les langues officielles : les langues représentent dans l’esprit des gouvernements successifs un dossier tabou!  Ces plans de langues officielles sont généralement élaborés en vue de s’acheter une paie sociale. C’est ce qui explique très certainement leur manque d’envergure, de vision. Ils sont vagues et très peu suivis par le gouvernement lui-même. Les institutions de la loi, tel le Commissariat aux langues officielles, n’ont pas les moyens financiers et humains pour bien effectuer le mandat confié par la Loi.  De plus, le rôle intrinsèque que doit jouer le Commissariat semble être méprisé par les députés à l’Assemblée législative. La SANB réclame donc un engagement ferme de la part de votre formation politique, en matière de langues officielles, qui se manifeste de la manière suivante :

1 – un plan d’action de dix ans qui comporte des investissements nouveaux avec des indicateurs de rendement mesurables;

2 – une politique exécutoire en matière du bilinguisme de la haute fonction publique;

3 – une reprise du rôle de ministre responsable des langues officielles au sein de la fonction du Premier ministre;

4 – un plan de mise en place d’une horizontalité réelle avec de nouveaux programmes adaptés aux besoins de la communauté acadienne et francophone;

5 – un plan de mesures positives afin de donner un nouveau sens à la Loi sur langues officielles.

  • Bilinguisme au sein de la haute fonction publique provinciale : les pratiques de ressources humaines en matière de bilinguisme devront être exemplaires.  Une pratique exemplaire, qui détermine un standard à atteindre, est une politique en matière de bilinguisme chez les hauts fonctionnaires de la province.  L’érosion du français comme langue de travail est de plus en plus évidente, et c’est largement la conséquence d’une haute fonction publique indifférente envers les obligations telles qu’énoncées dans la Loi sur les langues officielles.
  • Équité salariale : la société néo-brunswickoise doit, afin d’assurer un avenir prometteur pour toutes et tous, miser sur des mesures sociales concrètes qui assurent l’égalité dans toutes ses sphères.

Sachant pouvoir compter sur votre travail acharné dans le futur, je vous prie d’agréer, monsieur le Président, l’expression de mes sentiments cordiaux et distingués.

 

Joey Couturier, président par intérim