L’état de développement du Canada rural et la nécessité de revoir les régimes de développement régional

Ce texte est une version abrégée d’un document de réflexion plus approfondi sur le développement rural. Pour lire le texte dans sa version longue : Document de réflexion et de mise en contexte sur l’état du développement du Canada rural et la nécessité de revoir les régimes de développement régional

Un projet unificateur pour le Canada : vers une nouvelle politique de la ruralité 

S’assurer que chaque kilomètre carré du pays puisse prospérer : voilà comment unifier le Canada et en faire un modèle dans le G7. Le problème, c’est que la ruralité est méconnue, voire perçue à tort comme un fardeau. Le développement économique des 50 dernières années s’est concentré sur les régions densément peuplées du sud du pays. Si les deux secteurs qui sont traditionnellement associés à la ruralité, soit l’agriculture et les ressources naturelles, ont connu des changements importants, et que des politiques spécifiques leur sont consacrées, la réalité du Canada rural est plus complexe. D’autres modèles de développement existent (en Europe, notamment). C’est pourquoi la question exige davantage de recherche, une étude exhaustive dans sa globalité, des consultations à travers les différentes communautés, ainsi qu’une approche citoyenne dans la planification de solutions (par, pour et avec). Le but : créer un cadre de l’aménagement du territoire pour les 50 prochaines années.  

C’est une question de souveraineté, de prospérité et de démocratie : 

1) Souveraineté : Celle-ci se définit par l’occupation du territoire. Le Grand Nord canadien demeure, malgré son immense beauté, notre plus grande faiblesse en matière de sécurité nationale. L’accélération des changements climatiques fait de l’Arctique un enjeu géopolitique de premier plan. D’autre part, la crise de la Covid-19 souligne le problème de la souveraineté alimentaire au Canada, qu’il faut repenser en termes d’action locale, de résilience des communautés, de transition écologique et de rentabilité des petites et moyennes entreprises. Cette question implique l’agriculture, qui a longtemps été un marqueur d’occupation du territoire. 

2) Prospérité : La ruralité est de moins en moins « traditionnelle », et les possibilités pour qu’elle contribue à la prospérité du pays sont plus nombreuses que jamais. Il faut penser agrotourisme et promotion du terroir, énergies renouvelables et télétravail (des fonctionnaires comme des contribuables). La qualité de vie, quoique différente, peut être aussi sinon plus grande en région. Le potentiel de développement est énorme, mais encore faut-il que les services ne soient pas réduits davantage (accès à internet haut débit, soins de santé, écoles, etc.). Des plans spécifiques sont nécessaires pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre (les travailleurs étrangers temporaires représentent une solution coûteuse et peu viable à long terme), à la spéculation immobilière, aux besoins en télécommunications. Le travail saisonnier dans les régions côtières met en lumière les problèmes d’un programme comme l’assurance-emploi.  

3) Démocratie : Il existe présentement un déficit démocratique dans les régions rurales causé par le manque de structures de gouvernance et par l’éloignement des grands centres urbains. La décentralisation, voire la création de nouvelles structures démocratiques, permettrait une gestion communautaire plus inclusive et une représentation plus équitable des citoyens, ce qui pourrait propulser les potentialités des régions rurales (mais aussi un réalignement des politiques sectorielles qui régissent les ressources naturelles, dont les grands projets sont souvent contestés dans l’opinion publique). Les gouvernements locaux (lorsqu’ils existent) ont très peu de pouvoir de contrôle sur les projets, et très peu d’accès aux ressources elles-mêmes, aux retombées fiscales, etc.

Une ruralité par, pour et avec les communautés qui composent le Canada : cela signifie prendre en compte les besoins, les spécificités et la diversité de celles-ci. Une grande oubliée de la ruralité est la réalité côtière, axée sur les industries de la mer. Une région comme la Péninsule acadienne représente un cas d’espèce à étudier.

Trois groupes en particulier sont concernés par la ruralité et l’asymétrie territoriale canadienne, que ce soit pour des raisons historiques ou pour en assurer le plein potentiel de développement : 

1) Les peuples autochtones du Canada (Premières Nations, Métis et Inuit). Un développement des régions rurales, où la vaste majorité des communautés autochtones sont situées, qui n’impliqueraient pas ces dernières est un non-sens. Dans le Grand Nord, la souveraineté nationale ne peut faire abstraction du peuplement par les Inuits. 

2) Les communautés de langue officielle en situation démographique minoritaire (comme celle qui compose la Péninsule acadienne). Que ce soient les Fransaskois dans les régions agricoles des Prairies, les Franco-Ontariens dans la région minière du Nord de l’Ontario, ou encore les Acadiens de la côte atlantique, sans oublier les Anglo-Québécois des Townships, les CLOSM sont très largement concernées par la ruralité, et leur épanouissement ne peut passer que par celui du Canada rural. 

3) Les nouveaux Canadiens. Ces derniers sont quant à eux sous-représentés dans les grandes régions rurales du pays (contrairement aux efforts de peuplement du 19e siècle), puisque les services aux nouveaux arrivants se retrouvent principalement en ville. Pourtant, la croissance économique et démographique du pays passe par l’immigration, en particulier dans les CLOSM. Une stratégie holistique en matière de ruralité doit permettre aux communautés rurales de développer un environnement accueillant pour les nouveaux arrivants, tout en cherchant à renverser la tendance vers la dénatalité et l’exode qui la caractérise depuis plus d’un siècle. 

Le gouvernement fédéral doit impérativement se soucier de l’avenir de la ruralité. Cela permettrait la création d'un nouveau contrat social afin d’assurer le ruissellement d’une prospérité plus démocratique sur l’ensemble du pays, tout en luttant contre les inégalités sociales qui sont aussi territoriales. Plusieurs options s’offrent au premier ministre :

  • Un comité parlementaire;  
  • Un comité sénatorial;
  • Un comité mixte.

Idéalement, les députés des régions rurales eux-mêmes seraient les premiers concernés. Et le Sénat, qui a la vocation de représenter les régions, pourrait devenir un leader sur la question. L’asymétrie du pays demande une réponse innovante, une approche citoyenne et une grande implication du gouvernement fédéral. Il y a urgence d’agir.


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Éric Dow, Directeur des communications 

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